Bureaux de la CPAM à Lormont – POGGI Architecture (2020) Photo : Javier Callejas

1. Réussir l’acoustique d’un plateau de bureaux

Le traitement du confort acoustique dans les bureaux est crucial pour le bien être des collaborateurs. En effet, ces environnements de travail nécessitent le calme et la concentration, mais doivent également faciliter la collaboration entre employés. La prise en compte de la spécificité d’exploitation des espaces, ayant chacun des paramètres acoustiques adaptés, est un des facteurs de réussite dans l’aménagement des plateaux de bureaux paysagers.

Cet article traite de l’aménagement intérieur des plateaux de bureaux. La distribution, fixe et modulaire, sera traitée dans un autre article. Les dispositions propres aux bâtiments nécessitent une étude globale : consulter un de nos experts !

2. Je suis gêné par le bruit au travail !

Selon l’Institut National de Recherche et de Sécurité (INRS), en France, plus de la moitié des travailleurs dans les open-spaces déclarent être gênés par le bruit. Les taux de gêne peuvent varier en fonction de l’environnement de travail, du niveau de bruit et de la durée d’exposition au bruit.

L’INRS note que le bruit dans les open-spaces peut provenir de diverses sources telles que les conversations, les téléphones, les imprimantes, etc. Le bruit peut affecter la santé et le bien-être des travailleurs, en réduisant la capacité de concentration et en augmentant le stress et l’anxiété.

L’origine de la gêne peut être liée à de nombreux facteurs :

  • Les distractions sonores : Les conversations, les téléphones, les alarmes, etc. peuvent distraire les employés de leur travail.
  • Les échos : Les échos peuvent se produire lorsque les sons sont renvoyés plusieurs fois dans la pièce, ce qui peut être ennuyeux et difficile à ignorer.
  • Le bruit de fond constant : Le bruit de fond constant dans les open-spaces peut inclure les conversations, les bruits de clavier, les téléphones, le fonctionnement des équipements techniques de chauffage et de ventilation, etc.

À titre d’exemple, le graphique ci-dessous est extrait d’une enquête de l’INRS : pourcentage de personne ayant répondu être particulièrement gênées par différentes sources.

enquête GABO – Source INRS

Exemple d’enquête GABO – Source INRS [1]

Avant d’envisager de traiter un espace, il est essentiel de prendre le temps d’examiner le type d’activité pratiqué sur le plateau et les différentes causes de la gêne.

Pour réduire les effets négatifs du bruit dans les open-spaces, il est recommandé de définir une organisation intelligente du plateau en limitant si possible la coactivité. Le dernier chapitre propose des solutions acoustiques applicables si la coactivité ne peut pas être évitée.

Ces dispositions peuvent être étudiées à l’aide de la modélisation acoustique et les acousticiens peuvent accompagner les aménageurs dans l’optimisation du confort de travail lors de travaux d’aménagement.

Modélisation d’un plateau de bureaux

Modélisation d’un plateau de bureaux

3. Quelles normes pour l’acoustique des bureaux ?

En France, les aménageurs peuvent s’appuyer sur les deux normes les plus couramment utilisées. Premièrement, la NF S31-080 (2006) relative à l’acoustique des bureaux et espaces associés. Cette norme détaille les paramètres acoustiques adaptés aux différents types d’espaces. La norme propose 3 niveaux de performance en fonction du degré de confort recherché.

La seconde norme est la NF EN ISO 22955 (2021) relative à la qualité acoustique des espaces de bureaux ouverts. Cette norme remplace l’ancienne norme NF S31-199.
La particularité de la norme NF EN ISO 22955 est d’adapter les critères acoustiques recherchés lors de l’aménagement en fonction de l’usage des plateaux de bureaux. Par exemple, un open space accueillant une activité se pratiquant essentiellement par téléphone, comme c’est le cas pour les call center, sera traité différemment de celui accueillant une équipe de R&D où le travail collaboratif est essentiel.

Dès la publication de la nouvelle norme ISO en 2021, nos acousticiens de GANTHA ont mis en place un programme de compréhension de la norme afin d’identifier les adaptations apportées par le nouveau texte. Elles concernent principalement l’ajout d’un critère de confort (Lp,A,S,4m) et d’un nouveau type d’activité.

Enfin, il existe des référentiels permettant d’inciter la démarche de qualité à l’échelle des performances globales d’un bâtiment. Par exemple, le label HQE de Certivéa, le BREEAM, le WELL, etc. Ces référentiels fixent des critères acoustiques renforcés pour certains espaces de bureaux. Néanmoins, la distinction entre interventions sur le bâtiment et ce qui est de l’ordre des aménagements est souvent floue.

Ci-dessous les labels BREEAM et HQE Bâtiment durable de Certivéa.

4. Quelles sont les paramètres liés au bâtiment et ceux liés à l’aménagement ?

La différence est mince sur le plan du confort acoustique dans les bureaux, néanmoins il est d’usage de considérer que les paramètres acoustiques liés aux parties structurelles (façades, planchers, refends, divisions en lots), les équipements techniques (ventilation, chauffage, plomberie, ascenseurs) et les revêtements de sol incombent à la qualité acoustique de la construction, le plus souvent sous la gestion du bailleur.

Ces dispositions influent sur :

  • les isolements aux bruits aériens entre lots,
  • le niveau de bruit lié aux installations techniques,
  • la transmission et la perception des bruits de choc,
  • la perception des bruits de l’espace extérieur (transports, activités).
acoustique des bureaux

Installation des réseaux CVC et électriques avant aménagement – Projet de bureaux étudié par GANTHA

Par opposition, les aménagements intérieurs sont souvent liés au type d’activité. Parmi les principes constructifs, on recense : les cloisons de distribution fixes ou modulaires (cloisons démontables), les panneaux absorbants muraux, le mobilier y compris les séparatifs entre postes de travail.
Ces dispositions influent sur :

  • le niveau de bruit ambiant,
  • la réverbération dans un bureau,
  • le confort de travail au poste,
  • la décroissance spatiale du son sur le plateau,
  • l’intelligibilité et l’atténuation acoustique poste à poste,
  • la création de zones de concentration, zones de collaboration, salles de réunion et des zones de détente.

Lors de travaux preneurs, GANTHA réalise des études acoustiques sur les nouveaux bureaux pour étudier la disposition des traitements. Des calculs en 3 dimensions permettent de vérifier que les critères acoustiques sont atteints : consulter nos références.
La suite de l’article traite principalement des aménagements acoustiques intérieurs, le cloisonnement étant traité dans un autre article.

5. Si possible : de la moquette au sol

Au sol, la moquette en dalles présente trois avantages notables sur le confort acoustique des bureaux ouverts :

  • excellente sonorité à la marche, ce qui réduit la distraction lorsque les employés marchent dans les allées,
  • elle participe à l’amélioration du confort intérieur en réduisant la sonorité,
  • elle diminue la transmission des bruits de chocs.

La moquette au sol est le revêtement le plus efficace sur le plan acoustique. Elle permet de diminuer la quantité de traitement par ailleurs (sous couche acoustique et absorbants rapportés) et contribue donc à l’optimisation du confort acoustique sur les bureaux paysagers.

Moquette acoustique réemploi

Exemple de moquette réutilisée

6. Des ilots acoustiques suspendus : est-ce un bon choix ?

acoustique des bureaux

Ecophon Solo Blanc – Etude ralisée pour Domolandes – Saint Geours de Maremme

Les îlots suspendus acoustiques sont des éléments de design de plus en plus recherchés pour améliorer la qualité acoustique dans les espaces de travail tels que les open spaces, les salles de conférence et les espaces de co-working. Ils ont plusieurs avantages :

  1. Absorption acoustique : Les îlots suspendus acoustiques sont souvent fabriqués à partir de matériaux absorbants tels que la laine minérale, la mousse polyuréthane ou le lin, ce qui les rend efficaces pour atténuer les réverbérations et les échos.
  2. Amélioration de l’esthétique : Les îlots suspendus peuvent également servir de décoration, en ajoutant de la couleur et de la texture à un espace de travail monotone.
  3. Flexibilité : Les îlots suspendus sont généralement conçus pour être facilement déplacés et réarrangés, ce qui les rend particulièrement adaptés pour les espaces de travail en constante évolution.
  4. Niveau sonore ambiant : En utilisant des îlots suspendus, les employés peuvent mieux contrôler les niveaux sonores dans leur espace de travail personnel, ce qui peut les aider à mieux se concentrer.

Cependant, ces îlots suspendus apportent un bénéfice limité si le plafond fait déjà l’objet d’un traitement acoustique efficace, comme par exemple un faux-plafond en dalles de laine minérale.
L’ajout d’îlots doit donc être étudié en fonction de la configuration existante.

En conclusion, les îlots suspendus acoustiques s’adaptent à la plupart des situations et ne nécessitent pas de travaux lourds. Leur bénéfice est multiple : qualité acoustique, esthétique et flexibilité.

7. Cloisons acoustiques, séparateurs, panneaux anti-bruit : indispensables pour délimiter les postes de travail

cloison bureau bruit

Bureaux MACIF à NIORT – Site de la Buteaudrie

séparation bureau acoustique

Bureaux ARTELIA à NANTES – Novawest

Ils permettent de réduire la transmission du bruit entre deux postes face à face ou côte à côte. Ils sont indispensables, en particulier dans le cas où les activités sont réalisées principalement par téléphone, ou pour les activités faiblement collaboratives nécessitant la concentration.

Ces séparatifs sont le seul moyen de réduire suffisamment l’intelligibilité entre postes se faisant face. Habituellement, les fabricants proposent des fixations directement clipsées sur le plateau du bureau, ce qui permet de modifier leur disposition et si besoin de les adapter en cas de réorganisation.

Les écrans acoustiques entre postes doivent être absorbants et parfaitement étanches en partie basse et sur les bords sinon ils perdent de leur efficacité.

8. A quoi servent les claustras entre îlots de travail ?

panneau anti bruit intérieur bureau

Les claustras acoustiques sont souvent utilisés entre les bureaux pour améliorer l’isolation acoustique entre les différents services et réduire la propagation sonore. Ils sont généralement fabriqués en matériaux ayant des propriétés d’absorption acoustique élevées, tels que le bois perforé, de la mousse absorbante tapissée, etc… et d’isolation acoustique minimale grâce à une âme pleine intérieure.

Posés sur pieds, les claustras agissent comme des barrières acoustiques, en aidant à atténuer les sons qui passent d’une zone de bureau à une autre. Cela peut aider à maintenir un niveau plus faible de bruit de fond, à protéger la discrétion des conversations en créant une zone isolée et favoriser la concentration tout en maintenant un environnement de travail ouvert.

cloison acoustique bureau open space

Séparatifs entre bureaux – Extrait de la brochure INRS [2]

Lorsque c’est utile, il est possible d’augmenter les espaces de rangement sur les plateaux de bureaux en combinant une étagère pleine en partie basse, surmontée d’un écran isolant et absorbant.

9. Les panneaux absorbants aux murs ?

Un moyen de réduire efficacement la réverbération sur un grand plateau de bureaux est d’appliquer des matériaux absorbants sur les murs. Ces absorbeurs de sons permettent de garantir des critères de confort « à vide » et annulent les effets de résonance et d’écho entre façades.

Particulièrement adaptés à cette mise en œuvre, les cadres absorbants autoportants à accrocher sur les murs permettent d’intervenir simplement en fixant ces traitements directement sur un support plein.

Il existe un très grand nombre de finitions :

  • dalle minérale protégée,
  • toile textile tendue,
  • film microperforé,
  • tasseau de bois,
  • panneaux de bois, tôle, plâtre perforés,
  • cadres imprimés personnalisables,
  • textile recyclé,
  • Murs végétaux,
  • etc.

N’hésitez pas à nous consulter pour obtenir des propositions de références et de fabricants en fonction de la finition recherchée.

cloison bureau bruit

Cadres acoustiques absorbants

Absorbant naturel

Cadre Vert sur Workplace Expo 2023

La surface, l’emplacement et la performance de ces panneaux sont optimisés par le calcul, à l’aide de modèle géométriques 3D réalisés à l’aide de CATT Acoustic. Attention cependant, les données transmises par les fabricants ne peuvent pas être utilisées directement dans ces logiciels car elles nécessitent un retour d’expérience et un recalage de leur performance.

10. Faire coexister plusieurs activités sur un même plateau

C’est l’opération la plus délicate !
En effet il faudrait idéalement isoler les activités hébergées sur le plateau de bureaux paysager les unes des autres. Or, tous les traitements proposés ci-avant permettent de conserver une certaine modularité dans l’aménagement des plateaux. Ils ne séparent pas les activités de manière étanche comme avec des cloisons traditionnelles.

L’art réside dans l’aménagement de zones suffisamment isolées les unes des autres par du mobilier, de préférence de grande hauteur.

bruit des bureaux coactivités

Exemple de disposition proposée en cas de coactivité – INRS [3]

L’INRS préconise également une surface de 7 m² minimum par opérateur [3].

Une autre possibilité consiste à interposer des zones tampon entre des espaces bruyants et des zones de calme. Par exemple, l’aménagement d’un espace de détente silencieux végétalisé ou un bloc sanitaire par exemple. Il faut néanmoins éviter les zones de pause, qui sont essentielles au bien être des collaborateurs et souvent bruyantes – surtout lorsque Arnaud et Emilie se racontent leur week-end !

Enfin, une très bonne solution consiste à intégrer dans l’aménagement des salles de réunion modulaires fermées. Ces dernières intègrent des prises, un système de ventilation autonome et parfois un système de visioconférence. Certaines références restent onéreuses, surtout pour au-delà de 4 places assises, mais des solutions démontables émergent en proposant des alternatives intéressantes.

11. Le rôle de l’ingénieur acousticien

L’ingénieur acousticien accompagne l’aménageur, l’architecte d’intérieur et les utilisateurs finaux dans toutes les démarches liées à l’acoustique.
Le projet démarre par la définition des exigences acoustiques. La définition des critères doit tenir compte de l’utilisation des bureaux et du type d’activité.

Dans le cas d’un site existant, il est conseillé de réaliser un diagnostic précis de la situation actuelle. Des mesures sont réalisées à l’aide d’une source de bruit normalisée. Des mesures du bruit ambiant sont réalisée en occupation et hors occupation. Enfin, des tests de sonorité sont réalisés à vide pour évaluer les performances acoustiques du bureau.

Des formulaires (GABO) peuvent aider à collecter le ressenti des collaborateurs et prioriser les actions à mener pour améliorer le confort sur les plateaux. Le questionnaire intègre des questions ouvertes, ce qui incitent les utilisateurs à argumenter leurs doléances.

Une fois l’aménagement étudié, l’ingénieur acousticien réalise un modèle 3D de la géométrie. Il intègre ensuite les différents traitements acoustiques envisagés. Les résultats sont calculés en plusieurs points récepteurs et sous la forme de cartographie.

Les logiciels permettent d’évaluer l’ensemble des paramètres acoustiques :
Niveau de bruit, temps de réverbération, intelligibilité, décroissance spatiale, atténuation entre postes, etc.
En fonction des résultats, les traitements peuvent être optimisés et une nouvelle proposition est rendue en concertation avec les autres membres du comité de pilotage du projet. Le rapport intègre la localisation précise des traitements sous la forme d’un plan de repérage.

Exemple de proposition 3D – Aménagement d’un plateau de bureaux.

Exemple de proposition 3D – Aménagement d’un plateau de bureaux.

cabine insonorisée bureaux

Cartographie acoustique – Niveau de pression acoustique SPL – CATT Acoustics

cloison bureau bruit

Analyse de la décroissance spatiale – CATT Acoustics

12. Que retenir :

Quelques propositions générales à retenir si vous êtes sur le point de réorganiser vos bureaux ou simplement briller comme Grégory à la machine à café :

  • veiller à ce que tous les postes de travail collaborant soient groupés (équipes, projets).
  • séparer les différentes équipes ou services, même si des échanges ponctuels entre eux sont possibles,
  • optimiser les déplacements entre les postes de travail et la position des espaces supports tels qu’espace reprographie, salles de réunion, etc.
  • Isoler les locaux bruyants des plateaux : cafétéria, hall d’accueil, reprographie
  • limiter la hauteur sous plafond à 3 m,
  • utiliser autant que possible les espaces support de proximité pour structurer les espace ouvert (salles de réunion, bloc sanitaire, stockage, etc.). Si les espaces sont trop proches, on peut compenser par des séparations; délimiter visuellement les zones de circulation, de manière à séparer les espaces de travail des flux de déplacement dans l’espace ouvert (rangements, claustras, végétation)
  • s’assurer que les cloisons et portes permettant d’isoler les espaces de réunion assure une confidentialité suffisante, pour ne pas gêner les postes voisins.

13. Le mot de la fin

En conclusion, nous espèrons que cet article vous aidera à comprendre les enjeux de l’aménagement acoustique d’un plateau de bureaux paysager. Garantir un confort de travail pour tous les collaborateurs est un facteur de réussite d’un service et d’une organisation.

Forts de leur vingt années d’expérience, nos ingénieurs réalisent régulièrement des études d’amélioration du confort acoustique. Ils accompagnent plusieurs grandes entreprises françaises dans la mise en place des aménagements sur les plateaux de bureaux paysagers, lors de réorganisations structurelles de ces entreprises, ou simplement lors d’interventions ponctuelles pour un service.