Dans de nombreux secteurs d’activité comme la pétrochimie, la papèterie, ou l’agroalimentaire, les exploitants sont amenés à stocker des produits sous forme liquide dans de grands réservoirs en extérieur. Au cours du temps et selon les produits stockés, les phénomènes de corrosion et de fatigue peuvent nuire à l’intégrité structurelle des réservoirs notamment entre le fond du réservoir et la première virole
Lorsque se produit accidentellement la rupture d’un de ces éléments, le produit stocké se met en mouvement et créé une fuite qui prend généralement la forme d’une vague. Plus le réservoir est volumineux plus les dangers pour l’environnement et pour l’humain sont élevés (pollution des sols, des eaux, dangers de mort, toxicité du produit).
Des essais de rupture à grande échelle se révéleraient très couteux et peu écologique. La plupart des études d’effet de vague se font donc par simulation et ont pour but de prédire :

  • La quantité de liquide surversée,
  • La surface épandue au sol,
  • Les efforts de pression sur les équipements rencontrés par la vague.

La simulation numérique 3D d’effet de vague permet de qualifier, de quantifier, et d’analyser les conséquences d’une fuite accidentelle d’un réservoir. Grâce à cet outil, nous pouvons mettre en place des solutions de rétention de liquide et aider au dimensionnement d’ouvrages résistant aux très fortes pressions.

effet de vague

1. Le principe de la simulation de « Surface Libre »

La méthode VOF « Volume of fluid » est une méthode de calcul diphasique qui consiste à capturer l’interface entre deux fluides. La résolution de l’équations VOF considère les deux fluides comme s’il n’y avait qu’un seul fluide incompressible à l’aide de la masse volumique apparente et la viscosité dynamique apparente. Il faut introduire une variable dans les systèmes d’équation qui permet de distinguer les phases dans l’espace discrétisé à n’importe quel instant donné. Les valeurs de cette variable sont comprises entre 0 et 1 et la variable est définie comme suit :

  • phase 1
  • phase 2
  • Interface entre les deux phases

Dans notre cas, correspond à l’air et correspond à l’eau.

simulation surface libre

1.1. Pourquoi comparer la simulation à une expérience ?

Il y a deux raisons :

  1. Pour prouver que le modèle numérique s’approche de la réalité. Dans notre cas, corroborer les résultats de l’expérience avec ceux de la simulation.
  2. Pour évaluer la précision du résultat de la simulation.

Pour calibrer le modèle numérique d’effet de vague avec précision nous l’avons comparé aux résultats d’une expérience réalisée en 2005 par W. Atherton (An experimental investigation of bund wall overtopping and dynamic pressures on the bund wall following catastrophic failure of a storage vessel. HSE Books, 2005) sur des critères précis :

  • Le rapport de masse surversée sur la masse initiale de liquide
  • Le rapport de pression dynamique sur la pression hydrostatique exercé dans la rétention
    – La pression hydrostatique
    – La pression dynamique

1.2. Présentation de l’expérience

L’objectif du dispositif expérimental est de reproduire le plus fidèlement possible l’effacement complet d’un réservoir d’eau (Disparition instantanée du contenant laissant une colonne d’eau s’effondrer) pour :

  • Avoir une meilleure compréhension des phénomènes physique,
  • Quantifier la pression sur un obstacle,
  • Quantifier la masse d’eau surversée.
effet de vague masse d'eau

Où :

  • H = Hauteur de la colonne d’eau
  • R = Rayon de la colonne d’eau
  • L = Distance de la colonne d’eau par rapport au mur
  • h = Hauteur du mur de la rétention

Le dispositif expérimental a été conçu pour créer artificiellement l’effacement complet d’un quart de réservoir d’eau. L’échelle réduite du dispositif permet de faire varier les aspects dimensionnels des différents éléments qui le constituent, pour permettre la répétition de l’expérience et établir plusieurs séries de mesure de pression dynamique. Dans cette disposition le mur de rétention est circulaire. La porte guillotine se lève en moins de 0,1s répondant à deux hypothèses de calcul :

  • Les fissures du réservoir se propagent plus vite que le fluide.
  • Les fissures se propagent à la même vitesse dans la direction verticale et le long du réservoir cylindrique.

Le mur de rétention est équipé de cinq capteurs de pression et la rétention est équipé d’une évacuation d’eau pour mesurer la masse d’eau surversée.

Une fois la porte guillotine levée, la colonne d’eau soumise à son propre poids déferle dans la rétention. Lorsque le front de vague impacte le muret il se crée un phénomène de « flash » propulsant le liquide dans les airs. Quand le phénomène de flash se termine, le liquide qui surverse au-dessus du muret termine alors sa course sur la table de déversement puis dans le bac receveur. L’image ci-après présente le phénomène de « flash ».

2. Comparaison entre la simulation et l’expérience

La simulation instationnaire incompressible de l’effondrement d’un quart de colonne d’eau est réalisée avec le logiciel ANSYS CFD. Le maillage volumique du domaine de calcul est construit en maille hexaédrique dont la plus petite taille d’élément est de 0,1mm près des parois et moins de 5 mm dans le volume. La résolution de la turbulence se fait par un modèle à une équation de transport dérivé du modèle k-Ɛ. Pour assurer la stabilité du calcul, un critère sur le pas de temps de calcul est respecté (nombre de Courant, ou CFL). Le pas de temps de calcul est de 1e-4s.
Les images suivantes présentent les résultats de la simulation. L’iso-surface bleue représente la surface libre, elle caractérise le mouvement de l’eau dans l’air. Trois temps de simulation sont présentés :

  • L’effondrement de la colonne d’eau,
  • Le phénomène de flash sur le mur,
  • La fin de la surverse et le début de l’épandage sur le sol.

Le tableau ci-dessous compare les résultats de la simulation et de l’expérience.

 

Pdyn

Pdyn  /Phyd

Rapport de masse

Expérience

1486 Pa

2,53

52 %

Simulation

1439 Pa

2,5

50 %

Différence

3,2 %

1,2 %

3,8 %

Les résultats de la simulation sont très proches de ceux de l’expérience. Il est à noter une légère différence notamment sur le rapport de masse d’eau surversée sur la masse d’eau initiale. La méthode numérique mise en place est bien représentative de l’expérience. Cela prouve la fiabilité des résultats des simulations numériques d’effet de vague.

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